Chaque dimanche d’août, le petit déjeuner à peine avalé, nous nous emparions, avec une joie non dissimulée, des paniers d’osier soigneusement tapissés de papier journal avant de nous éparpiller gaiement sur les pentes escarpées qui entouraient le chalet. L’air encore frais fleurait bon les neiges éternelles du Mont Blanc qui scintillait au loin sous le soleil. Courbés sur les buissons bas et drus qui nous griffaient les mollets, nous arrachions avec enthousiasme les précieuses baies par poignées.
Nos paniers ne connurent jamais les premières myrtilles, ce moment d’extase gustative nous était réservé. Nous les portions avidement à notre bouche, avalant quelques insectes et quelques feuilles amères au passage. Elles étaient parfumées, sucrées à point, avec une pointe d’acidité, encore fraiches sous la rosée du matin et gorgées de soleil à la fois. Elles éclataient sous nos petites dents, ravissaient nos papilles avant de disparaitre au fond de nos gorges avides. La profusion de ces friandises naturelles nous étourdissait. Nous ne pouvions cacher notre gourmandise car les myrtilles nous bleuissaient la langue et les lèvres et nous barbouillaient souvent jusqu’au front.
Heureusement, la perspective de la délicieuse tarte de tante Valentine nous poussait finalement à remplir généreusement les paniers délaissés.
Corinne L.N.