Sous le couvercle gris qui pleure, toute chose luit faiblement, comme attristée par l’absence de lumière franche. Quelques piafs bravent le silence et agitent légèrement les fils électriques qui strient l’espace. Pelouses, arbres, haies, tout est vert ! Vert foncé, vert jaune, vert tendre, vert à fleurs.
Sous un arbre immense et profusément feuillu se cache un palmier. Quel jardinier fou a eu l’idée de planter un palmier à l’ombre d’un autre arbre ? Le palmier est solitaire. Il se dresse, fier et courageux, et défie le soleil même brûlant. Il ne pousse pas en bouquet. Je suis là, dit-il, seul, magnifiquement seul. Admirez mon port impérial. Je n’existe pas pour vous, je ne vous procure pas d’ombre ou si peu. Je pousse, je grandis, je m’érige au milieu de rien. Le sable du désert m’honore de sa blondeur, et nos présences conjuguées affichent la vie, l’improbable vie…
Que dire de ces gazons fleuris que l’on sème à mes pieds ? Minable décor si convenu ! Les spots lumineux colorés insultent mes nuits. Mes feuilles effilées n’attendent pas vos lumières factices pour se tendre vers l’infini. Les étoiles sont le toit qui m’abrite, la lune, rieuse, joue aux ombres chinoises dans ma ramure.
Ne sentez-vous pas comme ma solitude vous aime ? Ne percevez-vous pas le frisson respectueux qui vous saisit devant ma majestueuse érection ? Je vous attire vers mes sommets d’où se découvrent l’immense et l’infini. Je demeure cependant bien arrimé au sol, enraciné dans cette terre qui m’a fait naître. Ma mère la terre. Lorsque quelque pluie goutte de mes feuilles pointues qui se courbent, je la nourris à mon tour.
L’eau est notre conversation, notre langage perpétuel. Recevoir et donner, aller-retour de la vie à la vie.
Alors, de grâce, je vous en prie, je vous en supplie, cessez de me décorer de vos vaines fleurettes et de vos lumières mercantiles.
Je ne suis pas à vous.
Je ne suis pas à moi.
Je suis.
Dominique B.