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Marranes par Rembrandt avec l'arrivée de soldats de l'inquisition

Marranes par Rembrandt avec l'arrivée de soldats de l'inquisition

Les territoires géographiques sont un plus par la richesse qu’ils portent en eux, l’histoire, les coutumes, les liens humains, tout ceci de façon généreuse à l’égard d’autrui qui ne sont pas «de là».

Mais ils peuvent aussi être un frein à l’accueil de l’autre lorsque ces particularité géographiques sont prises comme un étendard identitaire. Cela devient alors un diktat régional , les normands sont comme ça, les béarnais comme ça. Cela devient une foule qui nie les particularités et les identités de chacun.

Au terme de régionalisme, je préfère le collectif car le régionalisme peut aussi charrier, poussé à l’extrême, le rejet de «ceux de là-bas» et devenir communauté fermée sur ses ergots!

C’est pourquoi le mot marrane me parle. Au départ, ce terme revient à un temps où, l’Espagne très catholique a mis dehors les juifs qui étaient là depuis bien longtemps. Certains sont partis, d’autres sont restés pour ne pas être dépossédés de ce qu’ils nommaient leurs pays, à juste titre puisqu’ils étaient en Espagne depuis de nombreuses générations. Ils se sont alors publiquement «convertis» au catholicisme tout en continuant à faire perdurer leur religion juive dans la sphère «privée». Spinoza n’a pas eu la chance de pouvoir en être puisqu’il a été marqué du sceau du «herem» (mis au ban). En effet, il a payé le prix de ses écrits et a été exclu de la communauté juive. Il s’est alors réfugié à Amsterdam, d’où il a continué à écrire sur son thème de prédilection- le désir est l’essence même de l’homme- Cette phrase dit une chose primordiale sur la société humaine  Être mis au ban de la société juive, n’est pas sans rappeler l’anathème des Eglises catholique et orthodoxe. Depuis la sortie d’Egypte, les juifs ont toujours erré de pays en pays, de régions en régions, sans pour autant lâcher leur judéité.

Défricher les traces d’un héritage diffus, celui des marranes, permet l’émancipation par rapport à la religion. J’ai participé par un texte (N° 21-Mars 2013) à une revue -Temps marranes- dirigée par C;Corman et Paule Perez et, en lisant les nombreux numéros édités ou sur internet, le tricotages d’héritages multiples m’a beaucoup enrichi.

Ce que je trouve précieux, c’est de pouvoir interpénétrer les apports de chaque territoire, sans pour autant les confondre. Le grand art est de cultiver, avec des limites invisibles, le capital inhérent à chaque région et d’accepter de le partager. La frilosité avec laquelle certains n’ouvrent pas la porte montre leur peur d’être engloutis si les frontières sont mouvantes.

Ne pas être -du terroir- oblige ceux qui viennent d’ailleurs, et ils sont nombreux, juifs, migrants, déportés par la misère etc....à apprendre de là où ils atterrissent et à la fois d’apporter leur part d’-étranger- Si l’on se réfère à l’étymologie grecque, hospis(hospitalité -étranger) a une double traduction: plus proche et plus lointain. A l’intérieur de nous, il y a une part d’-inquiétante étrangeté- (Freud) et cet universel crée du lien social.

Ce thème sur les territoires continue à me faire écrire, à persévérer.

Véronique Kangizer

A propos du tableau de Rembrandt, lisez cet article très intéressant : https://jewpop.com/culture/extraordinaire-destin-menasseh-ben-israel-rembrandt/

Tag(s) : #Véronique M., #Véronique Kangizer, #Textes de l'atelier, #Territoires
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