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Toi, la fille de l’air et de la mer, gardienne de la terre, tu es une sorcière comme les autres. Tu habites un phare tout au bout du monde, ou une bicoque perchée sur la falaise. Nuit et jour tu veilles.

Tu es née sous des vents favorables, une brise légère berce ton enfance, le soir tel un ange gardien le zéphyr se lève sur ton sommeil. Ainsi à l’ombre des alizés tu déploies tes ailes.

Au bel âge, le vent n’a plus de secret pour toi, tu joues dans ses bourrasques, tu recherches son étreinte, son parfum t’enveloppe voluptueusement, tu humes sa saveur salée, tu respires enfin. Il t’a donné chair, te voici femme. Tu détestes l’ennui des jours sans vent. Le murmure des grands pins, le claquement des voiles, soufflent la vie !

A la saison de la sagesse te voilà inquiète, un vent mauvais s’est levé. Pourtant ta maison est blindée, ses volets sont armés. Il fait fi du passé ce vent, il rase tout sur son passage, qu’il vienne du nord ou du sud il nivelle les collines, il siffle sur les plaines. Que veut-il ? 

Tu ne reconnais plus ses franches bourrades d’antan, il se fait cyclone, ouragan ou tornade. Dans le passé les vents donnaient toute leur puissance sur le rivage, ils ne pénétraient guère à l’intérieur des terres, question de respect, de territoire. Maintenant avec la cupidité des hommes il en est tout autrement, il n’y a plus de limite à la violence des tempêtes. Les coups de vent sont incessants, imprévisibles, hurlements des branches, sifflements des oreilles. Tapi dans l’ombre le noroît se fait hargneux. Sa rage terrasse la terre mère, terrifiant ses enfants.

Tu essaies de lui faire entendre raison, il te rit au nez. Ses caprices te révulsent, sa destruction est intolérable, fini le temps où il te charmait. Tu luttes pas à pas contre vents et marées, en vain. Sa bise glaciale te plaque au sol. Ce soir tu t’avoues vaincue, tu t’abandonnes à son tourbillon, il t’emporte tel un fétu de paille. Peu importe, surtout qu’il ne touche pas aux cœurs tendres. Qu’il détruise ta maison, qu’il éparpille tes biens certes mais pas les petits. 

 Toi la fille du ciel et de la terre, tu te dresses contre lui. Tu te fais rempart, forteresse contre la folie des hommes. Gardienne inébranlable, tu veilles sur ceux qui doutent. Ils n’ont peut-être pas les mots, mais dans l’ombre les invisibles œuvrent en silence. Patiemment ils prennent soin de la nature. Sous leurs doigts habiles, les plaines retrouveront leur blé, les collines leurs prairies. Qu’il soit mistral ou sirocco, les petits sauront apprivoiser les vents.

Françoise Dezelle

Tag(s) : #Le vent, #Françoise 2L, #Textes des participants
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