Les volets bleus

Je hais Suzanne, depuis toujours. Enfin non, seulement depuis qu’elle vit avec mon ex.

Je hais également mon ex, pour, entre autres, la raison susmentionnée.

Je les hais chaque jour, avec acharnement, me plantant symboliquement des petites épingles vaudous pour ne jamais oublier leur trahison.

Nos soi-disant amis communs me donnent régulièrement de leurs nouvelles.

Qui sont bonnes, bien sûr, puisqu’ils sont heureux !

Ils ont même un chien maintenant, un bouvier Bernois évidemment. La race que je préfère !

Projet jamais mené à terme car « Môssieur » était allergique aux poils.

Il ne manquerait plus qu’ils attendent un enfant !

Quelle bonne idée que d’avoir conservé le lien avec Maxime, l’agent immobilier de notre petite ville. Après deux ou trois verres, il accepte volontiers de se laisser aller aux confidences.

J’apprends ainsi que les deux renégats  envisagent d’acheter la vieille demeure de la rue des glycines. Oui, celle aux volets bleus ! une merveille que je vois chaque matin.

Pas question de la leur laisser.

Je vous assure que jamais un dossier bancaire n’a été monté aussi rapidement.

Encore plus forte que Bernard Tapie !

Comment vous décrire l’extase de les voir passer plus ou moins discrètement devant ma nouvelle maison ?

Un jour peut-être viendront-ils boire un verre chez moi ? ha, ha !

Qu’en penses-tu Bobby, allez viens, on va faire un petit tour en ville.

Tu es tout beau avec ton nouveau collier.

Agnès C.