ATELIER D’ECRITURE du VENDREDI 22 SEPTEMBRE 2017
A la suite d'une lecture de "Jeune homme" du Norvégien K. O. KNAUSGAARD PAYSAGE D'ENFANCE
La marée descendante dévoilait un sable gris chatoyant, changeant, parsemé de mille pépites d’argent qui jouaient dans le soleil. Les grandes personnes disaient que cela s’appelait du mica mais, pour les enfants, le mica était un matériau qui faisait partie des fournitures scolaires : transparent, un peu raide, il servait à protéger les documents des professeurs. Il était donc hors de question pour eux, d’évoquer l’existence de mica sur la plage ! Évoquer les paillettes d’argent du sable fin n’était-ce pas plus beau, plus poétique ?
Les goémons brunâtres brillaient, ruisselants sur les rochers détrempés qui retenaient la mer en leurs innombrables anfractuosités. Ces ravissantes flaques d’eau de mer étaient tapissées de minuscules algues d’un vert tendre, qui frissonnaient dans l’eau claire. Par malchance elles faisaient aussi le bonheur des petits crabes, de minuscules étrilles, qui s’y réfugiaient à la grande frayeur des enfants. Pourquoi diable ces drôles d’animaux marchaient-ils de travers, se déplaçant en biais, les pinces dressées vers le ciel et les yeux exorbités ? Heureusement, les rochers qui dominaient majestueusement la petite crique étaient un refuge idéal pour fuir ces étranges animaux au comportement agressif, à la posture terrifiante. Et la mer reculait encore et encore, léchant le sol avec tristesse aurait–on dit.
En haut de la grève, un mur en granit bordait le littoral. Recouvert de lichen jaune d’or et vert cendré, il était encore tout chaud, tout imprégné de soleil. Lorsque la mer remonterait, c’était au galop qu’elle viendrait jusqu’à lui ; elle l’attaquerait gaiement, comme pour jouer. Elle jetterait sur lui la mousse pétillante de son allégresse à retrouver son fidèle ami.
Cette amitié indéfectible, ce chaleureux rendez-vous entre la mer et le vieux mur, étaient pour les enfants un évènement à chaque fois merveilleux : c’était le signal impatiemment attendu qui autorisait baignades, courses endiablées dans les vagues, plongeons qui laissaient les oreilles bourdonnantes et mille aventures à raconter.
Pour les jeunes conquérants, cette minuscule crique de la Bretagne sud était un continent à découvrir. Bien longtemps après, elle demeure intacte au souvenir de nos héros d’alors.
Fredaine