La peur des mots nous guette, elle nous suit, nous précède, nous accompagne. Elle glisse sur notre chemin et nous endort, nous entoure d’une ouate invisible.
Elle rejoint l’océan de l’impensé.
La peur, la crainte, le regret, l’angoisse se nouent dans la poursuite d’un mot qui dirait tout.
Chaque personne se débat avec un environnement de mots qu’elle n’aime pas, ne prononce pas, qui lui est propre.
Difficulté à prononcer un mot par superstition, conformisme, pudeur, difficulté à avouer, orgueil, lâcheté.
C’est ainsi que s’établît le silence dans les familles.
Ce qu’on n’a jamais osé demander, ce qu’on n’a jamais osé dire, ce dont on a contourné la pensée. La crainte de mal dire, de blesser, de rencontrer l’incrédulité, la fuite, le silence.
La peur si générale, si répandue d’exprimer sa pensée jette une ombre sur la confiance en soi, le dialogue, la recherche d’une vérité.
Le langage nous fuit, les mots sont approximatifs, inadaptés.
Et le silence s’accumule comme la poussière sur les étagères.
La parole n’est toujours que le promontoire de l’iceberg du silence.
La parole est une chance, une aventure, au-delà des hésitations, un déroulé qui prend le risque de se tromper.
L’écriture est une double chance, celle de prendre ce risque et de durer- un peu plus loin du silence.
Christine Lamy