Ce moment sera, je le sens, je le sais, inoubliable !
L’aboutissement de plusieurs vies charnelles au début, virtuelles par la suite spirituelles et connectées aussi diverses soient-elles, ce moment leur rendra hommage et sera l’ultime chainon nous reliant enfin à la perfection technique à la recherche de laquelle nous avons consacré tant et tant de rêves, d’espoirs et de recherche.
Nous partirons à l’aube silencieusement, riches de la nouvelle de la découverte de cette « capsule de temps « échappées à la technologie souveraine de notre monde, cette particule de l’espace mouvant et apprivoisé qui nous sert si bien il faut l’admettre à réaliser nos désirs, à réparer l’irréparables, à toujours si bien prédire, prévoir et appréhender.
Le matin sera certainement froid, et malgré nos scaphandres étanches et isothermes nous risquerons nos existences à traverser temporellement l’espace réfrigéré, nous serons encore une fois fascinés par les résidus de vie en forme de cloportes si résistants que seuls survivants témoins des temps anciens, que nous écraserons sans pitié mais sans malice car nos tenues nous rendent si maladroits que les dommages collatéraux se multiplient malgré notre longue expérience.
Nous avancerons happés par le désir de voir, d’avoir une preuve, d’être témoins de ce qui fut, qui est et peut être sera.
Nous avancerons dans le temps, la lumière naissante, le rosissement de l’horizon, cette ligne virtuelle qui recule devant nous et subsiste aux millénaires mettant sa couleur irisée à la disposition de nos rêves et nous guidant dans la nuit sidérale.
Nos regards se croisent et s’interrogent, est ce encore loin, combien de strates à parcourir, combien d’années lumière ou obscures à vaincre, combien de courage encore, menés par la curiosité, seul vestige de ce qui était l’essence même du temps où nous étions des humains.
La pluie de météorites, le tsunami astral, la secousse sismique sidérale et le trou noir engloutissant les siècles de notre histoire fragile nous aurons menés ici, maintenant devant l’étendue désertique et glaciale où quelques squelettes de ptérodactyles arrivent encore à esquisser quelques mouvements imitant ce qui s’appelait un battement d’ailes !
La faille de la falaise se devine au loin.
Nous approchons, doucement car autour de nous les particules libres se sont figées, une paralysie alentour que nous percevons avec peine entravés par nos scaphandres. Une chaleur, un bien être se répand dans notre corps et un bruit inconnu et pourtant familier résonne en nous, rythmé, saccadé, rassurant et effrayant car inhabituel.
L’entrée de ce renfoncement de rocaille est sombre et pourtant une lumière semble s’y attarder.
Regardons l
Les paramètres et azimuts le confirment nous y sommes.
Alors ? Cette capsule de temps ?
Sur un support doux jeté au sol, une femme nue, une vraie femme comme celles de nos connections avec notre historique passé, une femme en sueur, en pleurs et en douleur.
Un liquide rouge sombre semble se répandre autour de son corps martyrisé et pourtant à la buée qui recouvre nos visières nous devinons que ce liquide est chaud et la réconforte tout en la soulageant.
Ses cuisses entrouvertes laissent voir timidement au début et violemment par la suite une forme visqueuse qui se tord et surgit de ses entrailles en hurlant, les cris de la femme se joignent à ceux de la créature et malgré la violence de ce moment une sensation oubliée de nos intelligences technologiques reprend le dessus et nous réalisons que la buée gênante sur nos visières vient de l’intérieur, et que nous produisons une humidité presque agréable à hauteur de nos yeux et faisant battre le moteur de notre poitrine d’une façon inconnue, reconnue plutôt.
La Vie, à l’ancienne, la Vie éternelle et recommencée, la Vie souvenir des temps oubliés nous est revenue, nous est offerte à nouveau et nous qui avons su répondre à son appel serons les élus des galaxies et mondes du passé et de l’avenir.
Nous pourrons dire que nous y étions le jour où tout a recommencé, le jour où le passé et l’avenir se sont unis pour nous rappeler que l’espoir et sa force incommensurable passent aussi par la chair.
Le mécanisme le plus parfait, la réalisation la plus aboutie, le corps humain , cette merveille de sensibilité de sensualité et d’auto-réparation n’ayant pu être remplacée par les inventions de la recherche intelectuelle nous est rendu !
Et ce souffle infime, ce sentiment d’immensité et d’insignifiance en même temps, ce merveilleux et magique souffle que les anciens appelaient l’Âme nous enveloppe et nos regards se croisant nous ressentons une pulsion puissante et irrémédiable de besoin charnel, nous arrachons nos casques, nos combinaisons, nos stériles attributs de protection et nous nous jetons l’un vers l’autre dans un embrasement de notre peau douce, chaude et moite.
Nous ré -inventons l’amour et sa prière carnale, nous re -inventons la Vie.
Cette capsule éclatera, nous détruira à nouveau certainement, nous éblouira tant et tant de fois et nous laissera à jamais la certitude d’être les détenteurs du précieux secret de l’Eternel début des Temps passés et à venir.
Diana W.