Quand me sera-t-il donné à nouveau de m’éveiller dans cette tour de pierre, vigie immobile face à la mer ? L’air salé y dépose quelques traces blanchâtres en passant entre les moellons disjoints chauffés par le soleil. Ils charrient ce pays entier, mon pays, et me câlinent de leurs caresses. Patienter en attendant le soleil brûlant de midi. Sortir enfin et s’oublier sous l’envoûtement de l’haleine maternelle de la chaleur qui console de tout.
Savourer maintenant le baiser incandescent du soleil qui inonde buissons et éboulis. Quelques fleurs d’un mauve léger s’épanouissent avec langueur. Se laisser ensorceler par les assauts vibrants des rubans invisibles du myrte, ceux plus doux du thym et du romarin, tempérés mais entêtants.
S’abstraire peu à peu de ces soies musardes pour atteindre les âcretés du chêne vert, la brutalité de la ronce. Voguer souplement de la douceur à la rudesse. Tendre ses sens jusqu’au chèvrefeuille mielleux.
Tous se combattent et s’accordent.
Percevoir parfois, à l’abri d’un sourire complice, le fumet animal des crottes de chèvre desséchées qui fécondent de leurs abandons cette étourdissante mosaïque.
Dominique Olsenn