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J’habite le château là bas, au bout de la route, vers la forêt. Pour y accéder, il faut parcourir une certaine distance en sortant du village et trouver ensuite le chemin bordé d’immenses chênes qui forment la majestueuse allée de ma belle demeure. 

J’occupe huit des vingt-cinq pièces que comportent mon château. J’y ai créé un univers à la fois confortable, onirique et studieux. Je dispose d’un grand salon, de quelques chambres, d’une salle de cinéma, d’une salle de sport et d’un magnifique bureau qui est aussi appelé « la salle des rêves ». 

Jeu suis écrivain, c’est mon métier. Souvent le soir, je me retrouve dans ma si belle « salle des rêves », une immense pièce équipée d’une bibliothèque plusieurs fois centenaire, d’un magnifique bureau en chêne, d’un fauteuil capitonné et d’une Remington pure origine à laquelle je tiens beaucoup. Une belle et grande cheminée accueille le sceau de ma famille et le feu que je prépare quotidiennement y crépite toujours majestueusement. En réalité, je passe la plupart de mon temps dans la salle des rêves, le reste du château n’étant que décoration et convenances.

Écrire n’est pas toujours une chose facile. Parfois les idées viennent facilement et parfois elles ne viennent pas, ou trop peu. C’est le propre du métier d’écrivain, l’angoisse de la page blanche. Alors, pour cela, la salle des rêves est l’endroit idéal. Elle me fournit l’inspiration, les pensées ; je les traduit ensuite en mots, puis en histoires. 

Ainsi, le soir, si tout se passait normalement, tout défilait très vite. Des tas d’histoires extraordinaires sortaient en quantité impressionnante de ma tête et de ma Remington, comme la « T » sortait des usines Ford dans les années 10… Des petites (ou grandes) histoires d’amour, d’amitié, d’hommes, de femmes, de monstres, des trahisons, des capes et des épées, peu importe, c’était pour le quotidien local pour lequel je travaillais. Une histoire par jour, courte, la « plus extra-ordinaire possible », c’était la demande de mon employeur.

Ce soir, je sentais qu’une nuit blanche s’annonçait. J’aime écrire la nuit. Et j’ai beaucoup d’histoires à écrire. Alors je sors ma belle Remington et mon tas de papier. Tous les ingrédients sont réunis,  de quoi écrire, un bon feu et l’ambiance si particulière, intime et feutrée, de cet endroit que j’aimais tant. 

En général, de nombreuses histoires merveilleuses sortaient de mon imagination, celles dont j’avais besoin pour gagner ma vie d’écrivain. Ce soir là, je sentis un vent différent. Les pensées qui me vinrent à l’esprit concernaient cette grande pièce qui est mon bureau et le château dans lequel je vis. Quel était ce lieu dans les temps les plus lointains ? Qui y vivait ? Comment étaient décorés les lieux ? Y avait-il des animaux ? Des odeurs ? Quels étaient les rythmes de vie des propriétaires ? J’y pensais encore et encore, je ne pus m’arrêter, les images qui m’apparurent furent nombreuses et prolifiques. Les mots commençaient à tomber et ma Remington à trembler. Je racontais l’histoire, les origines de ma propre demeure. 

Tout se passait pour le mieux, le processus de transcription des rêves fonctionnait à merveille. Mais à un moment, je sentis un certain dérangement. Mon corps se mit à trembler, mes yeux à cligner et je fus transporté par un tourbillon de chaleur et de vent. Lorsque je pus enfin poser le regard sur quelque chose, je retrouvai mon bureau. Très bien, me dis-je. Mais telle ne fut pas ma surprise lorsque je constatai que tout autour de moi avait changé. Les murs, les meubles, le plafond, tout était différent. Le feu de bois crépitait dans la cheminée, ce qui me rassurait toutefois. Mais tout le reste était différent. Ma machine à écrire avait disparu et je trouvai devant moi un tas de vieux papier (qui sait, peut-être un vieux stock de chez Gutenberg), une plume et un encrier. Autour de moi, une ambiance sombre et humide, des meubles qui semblaient d’un autre temps, une fenêtre d’une taille ridicule laissant à peine passer la lumière et ne laissant rien voir de l’extérieur. D’ailleurs je me tournai vers la porte de sortie ce ce qui est censé être mon bureau, elle avait disparu ! Plus aucune issue ! 

Mon dieu où suis-je ? Suis-je enfermé, emmuré, prisonnier d’un quelconque monarque, d’un seigneur mécontent de la tournure d’une de mes histoires ? Étais-je un de ces pauvres diables condamnés à finir leur vie enfermés dans un donjon sombre, froid, crasseux et sans issue ?

Les questions fusaient, mais aucune solution ne s’offrait à moi. Je retournai la situation dans tous les sens, pas de sortie, pas de bruit, pas d’odeur, rien. Je rêvais certainement, j’allais me réveiller, après tout, j’étais dans la salle des rêves… Mais malgré toutes mes tentatives pour retrouver « ma » réalité,  rien ne revenait, tout restait froid, lugubre et inquiétant. A mon avis, j’étais prisonnier dans un temps lointain et, pour une raison que j’ignorais, je ne pouvais m’échapper de cette situation. J’étais enfermé dans mon rêve…

Tout à coup, une feuille de papier se mit à tomber doucement du ciel et finit lentement sa route juste à côté de moi. Vu la hauteur du plafond, elle mit un certain temps à atterrir. J’en déduis que quelqu’un voulait me transmettre un message. Je pris la feuille lourde et épaisse sur laquelle je pus lire un message écrit avec l’encre d’une plume que je ne connaissais pas. Ce qui me fut donné à lire me glaça le sang : « tu es prisonnier de sa majesté le roi de Bargenteland. Château Z, donjon B et chambre Y. Matricule Z.B.Y.Z.U.J. Une rançon te sera demandée si tu veux retrouver la liberté. Prière d’attendre l’arrivée du dragon du donjon pour pouvoir négocier les conditions de ta libération »…

Christophe L.

 
 

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J’habite le château là bas, au bout de la route, vers la forêt. Pour y accéder, il faut parcourir une certaine distance en sortant du village et trouver ensuite le chemin bordé d’immenses chênes qui forment la majestueuse allée de ma belle demeure. 

J’occupe huit des vingt-cinq pièces que comportent mon château. J’y ai créé un univers à la fois confortable, onirique et studieux. Je dispose d’un grand salon, de quelques chambres, d’une salle de cinéma, d’une salle de sport et d’un magnifique bureau qui est aussi appelé « la salle des rêves ». 

Jeu suis écrivain, c’est mon métier. Souvent le soir, je me retrouve dans ma si belle « salle des rêves », une immense pièce équipée d’une bibliothèque plusieurs fois centenaire, d’un magnifique bureau en chêne, d’un fauteuil capitonné et d’une Remington pure origine à laquelle je tiens beaucoup. Une belle et grande cheminée accueille le sceau de ma famille et le feu que je prépare quotidiennement y crépite toujours majestueusement. En réalité, je passe la plupart de mon temps dans la salle des rêves, le reste du château n’étant que décoration et convenances.

Écrire n’est pas toujours une chose facile. Parfois les idées viennent facilement et parfois elles ne viennent pas, ou trop peu. C’est le propre du métier d’écrivain, l’angoisse de la page blanche. Alors, pour cela, la salle des rêves est l’endroit idéal. Elle me fournit l’inspiration, les pensées ; je les traduit ensuite en mots, puis en histoires. 

Ainsi, le soir, si tout se passait normalement, tout défilait très vite. Des tas d’histoires extraordinaires sortaient en quantité impressionnante de ma tête et de ma Remington, comme la « T » sortait des usines Ford dans les années 10… Des petites (ou grandes) histoires d’amour, d’amitié, d’hommes, de femmes, de monstres, des trahisons, des capes et des épées, peu importe, c’était pour le quotidien local pour lequel je travaillais. Une histoire par jour, courte, la « plus extra-ordinaire possible », c’était la demande de mon employeur.

Ce soir, je sentais qu’une nuit blanche s’annonçait. J’aime écrire la nuit. Et j’ai beaucoup d’histoires à écrire. Alors je sors ma belle Remington et mon tas de papier. Tous les ingrédients sont réunis,  de quoi écrire, un bon feu et l’ambiance si particulière, intime et feutrée, de cet endroit que j’aimais tant. 

En général, de nombreuses histoires merveilleuses sortaient de mon imagination, celles dont j’avais besoin pour gagner ma vie d’écrivain. Ce soir là, je sentis un vent différent. Les pensées qui me vinrent à l’esprit concernaient cette grande pièce qui est mon bureau et le château dans lequel je vis. Quel était ce lieu dans les temps les plus lointains ? Qui y vivait ? Comment étaient décorés les lieux ? Y avait-il des animaux ? Des odeurs ? Quels étaient les rythmes de vie des propriétaires ? J’y pensais encore et encore, je ne pus m’arrêter, les images qui m’apparurent furent nombreuses et prolifiques. Les mots commençaient à tomber et ma Remington à trembler. Je racontais l’histoire, les origines de ma propre demeure. 

Tout se passait pour le mieux, le processus de transcription des rêves fonctionnait à merveille. Mais à un moment, je sentis un certain dérangement. Mon corps se mit à trembler, mes yeux à cligner et je fus transporté par un tourbillon de chaleur et de vent. Lorsque je pus enfin poser le regard sur quelque chose, je retrouvai mon bureau. Très bien, me dis-je. Mais telle ne fut pas ma surprise lorsque je constatai que tout autour de moi avait changé. Les murs, les meubles, le plafond, tout était différent. Le feu de bois crépitait dans la cheminée, ce qui me rassurait toutefois. Mais tout le reste était différent. Ma machine à écrire avait disparu et je trouvai devant moi un tas de vieux papier (qui sait, peut-être un vieux stock de chez Gutenberg), une plume et un encrier. Autour de moi, une ambiance sombre et humide, des meubles qui semblaient d’un autre temps, une fenêtre d’une taille ridicule laissant à peine passer la lumière et ne laissant rien voir de l’extérieur. D’ailleurs je me tournai vers la porte de sortie ce ce qui est censé être mon bureau, elle avait disparu ! Plus aucune issue ! 

Mon dieu où suis-je ? Suis-je enfermé, emmuré, prisonnier d’un quelconque monarque, d’un seigneur mécontent de la tournure d’une de mes histoires ? Étais-je un de ces pauvres diables condamnés à finir leur vie enfermés dans un donjon sombre, froid, crasseux et sans issue ?

Les questions fusaient, mais aucune solution ne s’offrait à moi. Je retournai la situation dans tous les sens, pas de sortie, pas de bruit, pas d’odeur, rien. Je rêvais certainement, j’allais me réveiller, après tout, j’étais dans la salle des rêves… Mais malgré toutes mes tentatives pour retrouver « ma » réalité,  rien ne revenait, tout restait froid, lugubre et inquiétant. A mon avis, j’étais prisonnier dans un temps lointain et, pour une raison que j’ignorais, je ne pouvais m’échapper de cette situation. J’étais enfermé dans mon rêve…

Tout à coup, une feuille de papier se mit à tomber doucement du ciel et finit lentement sa route juste à côté de moi. Vu la hauteur du plafond, elle mit un certain temps à atterrir. J’en déduis que quelqu’un voulait me transmettre un message. Je pris la feuille lourde et épaisse sur laquelle je pus lire un message écrit avec l’encre d’une plume que je ne connaissais pas. Ce qui me fut donné à lire me glaça le sang : « tu es prisonnier de sa majesté le roi de Bargenteland. Château Z, donjon B et chambre Y. Matricule Z.B.Y.Z.U.J. Une rançon te sera demandée si tu veux retrouver la liberté. Prière d’attendre l’arrivée du dragon du donjon pour pouvoir négocier les conditions de ta libération »…

Christophe L.

 
 

Tag(s) : #Christophe L., #Textes des participants, #la vie des objets
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