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Un signe de ponctuation littéraire et oublié à réhabiliter…
Pour vous quelques notes glanées ça et là sur le sujet : Aujourd'hui, le point-virgule n'apparaît plus qu'une fois tous les 390 mots, contre une fois tous les 205 mots en 2000 et une fois tous les 90 mots en 1781. « Si son usage a bien chuté depuis le milieu des années 2000, le point-virgule connaît un léger regain depuis 2017 », nuance Le Figaro
Mais où est-il passé ? Vous l’avez vu ? Cela faisait déjà quelques années qu’il s’éloignait. Aujourd’hui les auteurs et autres adeptes de la littérature s’inquiètent, car il semble véritablement avoir pris ses distances. Le point-virgule, ce signe de ponctuation très littéraire, est en voie de disparition. Selon une étude commandée par l’application d’apprentissage des langues étrangères Babbel, l’usage du point-virgule dans les livres anglais a chuté de près de moitié en vingt ans. Alors, faut-il s’inquiéter ? Ouest-France
Selon l’écrivaine Danièle Sallenave, il est indispensable :
« Le point-virgule non seulement convient, mais il est indispensable. Il laisse à la phrase le temps de s’épanouir, il évite de rompre l’unité de la pensée par la multiplication des phrases courtes. Il respecte la phrase, mais il la construit, au lieu d’en juxtaposer les éléments comme le fait la virgule », écrivait avec poésie l’académicienne Danièle Sallenave, en 2013.
Alors pourquoi en sommes-nous arrivés à le snober ? Est-ce parce que la tendance actuelle est à l’emploi de phrases courtes ? « Notre langue évolue et tend à se simplifier : les phrases se raccourcissent et s’épurent ; les mots s’internationalisent, et la grammaire, discipline impopulaire et rébarbative, subit chaque jour de nouvelles offenses. Le succès de réseaux sociaux comme Twitter, qui confine nos messages à 280 caractères, encourage une simplification du discours », écrivait le Canadien Gabriel Bertrand dans un billet pour le journal Le Monde en 2018.
Et voici la réflexion d’un blogger sur le sujet :
https://patrickjamesnc.substack.com/p/le-point-virgule-meurt-en-silence
« Dans un monde qui idolâtre l’instantané, le point-virgule a le malheur d’exiger une chose devenue presque subversive : du temps. Celui de la réflexion, de la nuance, du rythme. Autrefois champion de l’équilibre syntaxique, il est aujourd’hui relégué au panthéon des curiosités grammaticales, là où dorment les formes désuètes et les conjugaisons mortes.
Triste sort pour ce funambule discret qui marchait si élégamment entre deux idées.
Ce déclin n’est pas un accident.
C’est un déclin culturel, pédagogique, médiatique. L’école, qui autrefois enseignait la rigueur, a troqué la syntaxe contre la productivité. Les enseignants, pressés par des programmes hypertrophiés et un temps d’attention en chute libre, n’ont plus les moyens, (ni même le courage) d’expliquer pourquoi une idée mérite parfois mieux qu’une virgule, mais moins qu’un point.
Le point-virgule mal-aimé : trop chic pour son époque
Il faut dire que le point-virgule a mauvaise presse. Ce n’est pas seulement qu’on l’ignore ; on le méprise.
Dans l’imaginaire collectif, il symbolise la prétention grammaticale, le maniérisme littéraire, l’élitisme d’un autre temps. Kurt Vonnegut, ce grand iconoclaste, en disait : « Le point-virgule ne sert à rien. Ce n’est qu’un guillemet prétentieux qui ne sait pas ce qu’il veut. »
Ce mépris s’est insinué dans la littérature contemporaine. Cormac McCarthy, célèbre pour son écriture dépouillée, a banni le point-virgule comme un tabou. R.L. Stine et E.L. James, eux, ne se sont pas embarrassés de telles subtilités : virgules à tout-va, phrases courtes, et, surtout, un mépris tranquille pour la demi-mesure grammaticale.
Même la presse, jadis bastion du bon usage, a cédé.
Une chronique publiée en 2018 sur le site du Monde constatait l’évanouissement quasi total du point-virgule dans les quotidiens majeurs. Sur cinq pages du Times, une seule occurrence ; zéro chez le New York Times et, ironie suprême, aucune dans Le Monde lui-même. Le journalisme, naguère temple de la précision, semble désormais plus préoccupé par l’impact SEO que par la beauté rythmique d’un paragraphe bien construit.
Un symptôme bien plus grave : la disparition de la nuance
Soyons clairs : je ne pleure pas ici la mort d’un signe ; je m’inquiète de ce qu’elle révèle.
Ce n’est pas seulement une question de grammaire, c’est une affaire de civilisation. L’effacement du point-virgule accompagne la montée en puissance d’une écriture jetable, instantanée, binaire, simpliste et simplifiée au maximum. Le monde se vit désormais entre un point final et une virgule.
Le juste milieu, lui, est devenu suspect.
Ce que nous perdons, ce n’est pas qu’un signe : c’est une posture intellectuelle. Celle qui accepte la complexité, la hiérarchie des idées, la pensée articulée. Une langue qui se contracte trop finit toujours par restreindre la pensée. Si l’on simplifie à outrance la structure de nos phrases, on simplifie inévitablement nos raisonnements.
Car que permettait le point-virgule ? D’unir deux idées sans les fondre. D’exprimer une opposition sans rupture. De maintenir la tension logique tout en gardant la fluidité.
Le point-virgule, c’était le compromis élégant entre le marteau du point et le coussin molletonné de la virgule. Il était le diplomate de la ponctuation.
Un souffle de renaissance ? Tout n’est pas perdu, heureusement. Certaines maisons d’édition redécouvrent aujourd’hui les vertus de cette ponctuation raffinée. Des auteurs soucieux du rythme (une espèce en voie de disparition malheureusement) le réintègrent timidement dans leurs manuscrits. Il y a là un frémissement, une résistance feutrée, presque littéraire, à la dictature de la punchline... "
Selon le Bescherelle : Un point-virgule permet de séparer deux propositions indépendantes, mais liées par le sens.
• Le point-virgule marque une pause plus forte que la virgule, mais moins forte que le point.
• On l’utilise surtout pour marquer les étapes d’un raisonnement, souligner l’enchaînement des idées.
Ex. : « Les enfants commencent par aimer leurs parents ; devenus grands, ils les jugent ; quelquefois, ils leur pardonnent. » (Oscar Wilde)
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